Le blé
Les bonnes nouvelles viennent des marchés internationaux
Depuis 2 mois, l’inquiétude face à l’épidémie déclenche un réflexe de stockage des denrées de base. En France, les consommateurs se sont d’abord rués vers les pâtes, puis vers la farine. A une autre échelle, des pays importateurs, tels que l’Algérie ou l’Égypte, ont multiplié leurs achats de blé. D’importants exportateurs ont plafonné leurs sorties, notamment la Russie et l’Ukraine. Ces mouvements ont mis les marchés sous tension, les cours mondiaux montent depuis mi-mars, retrouvant leur niveau de mi-janvier. La compétitivité du blé français s’améliore et lui permet de très belles performances à l’export (+23% / N-1).
Cependant, le débouché panification est très impacté par la fermeture de la RHD
Ainsi, le débouché panification est révisé à la baisse de 6% sur l’année, du fait de la chute de la demande en boulangerie artisanale et industrielle. Ce segment pèse 90% des ventes de farine. Sa diminution ne pourra que partiellement être compensée par les efforts des meuniers pour réallouer les volumes vers la demande en farine des consommateurs. Faute de chaîne d’ensachage ou confrontés à des difficultés dans l’approvisionnement en sachets de 1 kg et à la saturation de leur outil, ils proposent souvent des conditionnements de 5, 10, voire 25 kg en grande surface.
L’orge
La bonne nouvelle ne concerne que l’orge fourragère
Les exportations de grain sont dynamiques (+ 20 % / N-1), avec une bonne tenue du débouché fourrager et une demande accrue des pays tiers. L’utilisation française en alimentation animale se maintient.
Mais l’orge de brasserie est mise en difficulté par les conséquences du confinement
La fermeture des bars, restaurants, et l’annulation des événements sportifs et des festivals font chuter drastiquement la consommation de bière et entraîne la chute des volumes transformés en malt pour le marché national et l’export (respectivement -7% et -4% / N-1). Le marché, déjà attentiste avant la crise sanitaire, se maintient à un bas niveau.
Les stocks d’orge et de bière sont importants. L’Association des brasseurs de France évalue à 10 millions de litres les stocks, dont la majorité devra être détruite. En effet, la bière en fut à une durée de conservation de seulement 6 mois. Restent les stocks d’orge dont les perspectives de valeur sont sombres.
Perspectives
Si certains brasseurs ont réagi en développant de nouveaux segments (bières bouteilles en grande surface ou vente directe), cette crise fera sans doute disparaître des centaines de brasseries, surtout parmi les plus récentes (60% des 2 000 brasseries françaises ont moins de 3 ans).
Le colza
La bonne nouvelle vient de la demande en tourteau non-OGM
La chute du cours du pétrole liée au confinement généralisé entraîne une baisse spectaculaire des cours mondiaux des matières premières liées au prix de l’énergie (maïs, sucre, huiles végétales). En dépit de la perte de débouché en biocarburant, la graine de colza française est épargnée par la crise grâce à la demande soutenue en tourteau non-OGM et à une offre minorée depuis plusieurs années. Dans l’attente d’une récolte européenne faible en 2021 et d’une demande en alimentation animale et humaine soutenue, le marché du colza, ou du moins ce qu’il en reste, tire assez bien son épingle du jeu : après avoir connu une chute de presque 50 €/t en un mois avec le pétrole, les cours se sont repris.
Le maïs
Mauvaise nouvelle, même si elle est tempérée par la demande fourragère
Le prix du maïs français, compétitif face au blé tendre, est maintenu par les importantes demandes fourragères française et européenne. Il baisse dans le sillage de la chute de consommation des biocarburants, mais nettement moins que le maïs américain.
À la suite des difficultés rencontrées à l’automne et au printemps pour semer les autres cultures, le maïs a parfois été l’ultime recours. Cela explique en partie que la surface emblavée ait augmenté de 11% sur cette campagne. La hausse de production risque de peser sur les cours.
Ne pouvant compter sur le soutien de la demande mondiale en carburant, la rentabilité de la culture semble bien difficile à atteindre cette année.
Mathilde SCRYVE – Veille économique agricole CERFRANCE